Les Leçons de Katrina



La plupart du temps, ces drames se produisent dans le « tiers monde », victime de toutes les malédictions. Récemment, le tsunami de décembre 2004 a fait exception, non pas territorialement puisque les zones affectées appartiennent bien au « tiers-monde », mais en raison du nombre élevé de victimes provenant des pays riches. Avec Katrina, c’est l’État le plus riche du monde, l’unique superpuissance de la planète, pénétrée de son écrasante supériorité tant économique que militaire, que le destin a frappé. Et ce pays là s’est trouvé aussi désemparé, aussi impuissant que la Thaïlande, l’Inde ou le Sri-Lanka dans des circonstances comparables. D’où plusieurs leçons qu’il importe de tirer rapidement si l’on s’intéresse au développement durable de l’humanité. La première est une vérité universelle : face à l’émergence brutale d’une situation complexe, la capacité de réaction d’une société humaine est à la mesure de son degré de préparation. Cela vaut pour les catastrophes naturelles comme Katrina ou le tsunami de Décembre, mais aussi pour les guerres. (…)
Deuxième leçon : les déchaînements naturels continueront de se produire, indépendamment de toute cause humaine, particulièrement avec les mouvements de l’écorce terrestre ou les turbulences du climat ; mais il est hautement vraisemblable que les déchaînements anthropiques, c’est-à-dire provoqués – involontairement – par l’activité humaine, vont se multiplier. Certes, rien ne permet d’affirmer que Katrina appartienne à cette catégorie. Ce drame n’en doit pas moins être considéré comme un avertissement, en particulier pour les pays, comme les Etats-Unis ou la Chine, qui tendent à traiter par le mépris l’accélération du changement climatique.
Il y a là un véritable défi pour la gouvernance de la planète dans son ensemble : qui dit mondialisation dit multiplication des problèmes dont la solution ne peut être que mondiale. Puisque les Etats-Unis se trouvent actuellement et pour au moins encore quelques décennies dans la position de leader, il leur appartient d’exercer leur responsabilité historique dans ce domaine. Enfin, troisième leçon, aussi bien la réaction face aux catastrophes naturelles que leur prévention lorsqu’elle est possible, doivent être considérées comme des problèmes internationaux de dimension mondiale. La remarque ne vaut pas seulement pour les soubresauts de la terre ou de l’atmosphère, mais aussi pour les fléaux comme les pandémies (sida). Voilà pour le long terme.
Source : © Le Monde, 22 septembre 2005, Thierry de Montbrial