Effets indirects de la pollution maritime



Compte tenu de l’utilisation d’un fioul brut de bas de gamme pour la propulsion des navires, seule une partie du fioul peut être consommée par les machineries lorsqu’il fait route. Avant d’être utilisé comme carburant, il doit donc être purifié par centrifugation. Cette opération génère des résidus (environ 5 % du volume total de fioul embarqué) qui ne peuvent être brûlés et sont stockés dans les fonds de cales. Outre ces résidus de fioul, les navires consomment une importante quantité d’huiles de graissage, qui fuient des machineries et s’accumulent également dans les fonds de cales. Les pollutions dues aux vidanges des moteurs, aux huiles et résidus de fioul concernent tous les types de navires : transport de cargaison (tankers, vraquiers, porte-container..), transport de passagers (bateaux de croisières, ferry..) et bateaux de pêche. On appelle " sludges " ces déchets constitués de résidus de fioul et d’huiles de vidange qui sont rejetés à la mer. Plusieurs méthodes sont utilisées pour estimer la quantité de sludges : 1. Analyse de la quantité d’hydrocarbures dans l’eau
Sur la base d’échantillons prélevés dans différents compartiments de la colonne d’eau, la concentration d’hydrocarbures a été établie entre 10 et 40 microgrammes/litres en Méditerranée. En actualisant cette estimation avec l’augmentation du trafic maritime, la quantité totale d’hydrocarbures concentrée dans l’eau serait comprise aujourd’hui entre 0,7 et 1,3 millions de tonnes pour la Méditerranée. 2. Analyse à partir de la consommation des navires en Europe
Cette pollution est facilement calculable. On connait la consommation mondiale de fioul pour bateau, elle est de 228 millions de tonnes. Chaque tonne génère environ 2 % de sludges, ce qui fait 4,56 millions pour le monde entier et 1,3 millions pour la Méditerranée. 3. Analyse à partir du volume de marchandises transportées et le type de navire.
L’Union Européenne a réalisée en 1997 une étude très complète à l’échelle de l’Europe selon 2 types d’approche. L’une donne 1,3 millions de tonnes comme résultat, l’autre 1,7. Ces chiffres sont calculés pour l’Europe entière mais le trafic dans l’ensemble de la Méditerranée équivaut à celui de l’ensemble de l’Europe. On peut donc considérer qu’ils sont directement représentatifs de la situation en Méditerranée. 4. Analyse à partir de photographies réalisées par des satellites civils de l’Agence Spatiale Européenne (ESA).
L’ESA a étudié systématiquement 8 % de la surface méditerranéenne pendant 18 mois. Les résultats de l’étude ont été généralisés à la surface totale de la Méditerranée. En considérant qu’une nappe fait en moyenne 10 microns d’épaisseur, le volume de pollution annuel serait de 750 000 à 1,3 million de tonnes. Donc quelle que soit la méthode utilisée, la pollution volontaire par rejet de sludges en Méditerranée est comprise entre 0,7 et 1,5 millions de tonnes par an (soit une moyenne de 1 million de tonnes). La Méditerranée est cependant désignée par la convention MARPOL comme Zone Spéciale Marine dans laquelle tout rejet d’hydrocarbures est strictement interdit. En un an, lors des observations de routine de l’ensemble de la Méditerranée, 1 638 rejets d’hydrocarbures ont été repérés par l’ESA. La fréquence d’observation étant de 1 jour tous les 2 mois, soit 1,6 % du temps, ce sont 100 000 rejets qui se produisent par an en Méditerranée, soit 280 rejets par jour. La Méditerranée ne représente que 1 % de la surface des mers du globe avec le transit de 28 % du transport mondial de produits pétroliers. Elle est donc un remarquable échantillon représentatif du transport maritime dans le monde.
Source : d’après le rapport WWF 2003 sur la pollution marine par hydrocarbures et les dégazages sauvages en Méditerranée