L’argent des immigrés



Longtemps considérés comme peu productifs, les migrants sont la première source de financement extérieur des pays en développement. D’après la Banque Mondiale, les envois de fonds ont plus que doublé au cours de la décennie écoulée, passant de 102 milliards de dollars en 1995 à environ 232 milliards de dollars en 2005.
A titre de comparaison, l'aide publique internationale au développement ne s'est élevée, en 2004, qu'à 79 milliards de dollars. La même année, dans les pays les plus pauvres, pour un dollar provenant de l'aide internationale, six étaient versés par les immigrés. (…) Au Sénégal, les budgets des ménages sont constitués à 50 % par des versements de l'étranger. (…) Les États d’accueil essaient de coopérer avec les régions de départ pour favoriser les investissements productifs et la création d’entreprises. (...) 14 milliards d’euros ont été envoyés par les migrants travaillant en Europe en 2005. Des associations de développement sont soutenues par l’Union européenne pour canaliser cette manne. Sékou Bathily, 34 ans, originaire de la région de Kayes, au Mali, vit dans un foyer de travailleurs à Montreuil (Seine-Saint-Denis). (…) Son père, reparti dans son village de Bada, l'avait fait venir en 1990. Aujourd'hui, Sékou Bathily dirige Bada France, qui gère l'épargne d'une trentaine d'adhérents originaires du même lieu. Grâce aux 10 euros versés tous les mois par chacun, l'association subvient aux besoins des familles au Mali, prend en charge les salaires des six enseignants de l'école qu'elle a fait construire en 2000 et finance le centre de santé communautaire. Sur les fonds envoyés en commun au pays par Bada France avec une douzaine d'autres groupes de Maliens originaires de la région - jusqu'à 20 000 euros par passage, convoyés par des gens de confiance -, 80 % sont consacrés à la santé, à l'éducation ou à l'achat de nourriture et 20 % à des investissements collectifs tels que des puits. Source : Jacques Follorou, Le Monde, 10 mai 2006-05-27 / Catherine Wihtol de Wenden (CNRS, CERI), Contribution lors de la séance d’introduction du Forum Migrations de la FIDH, Lisbonne, avril 2007